C'est un triangle dont le sommet pointe sur Séville, et dont la base va de la province de Huelva à l'Ouest au delà de la baie de Cadiz à l'Est. Certains l'appellent « el rincon del sur » (le coin du Sud). Une région que pour ma part je trouve fascinante. Bien que... Commençons par le plus désagréable. En venant d'Huelva, et en suivant vers l'Est la route qui longe la côte, on rencontre d'abord de ces stations balnéaires détestables, construites, comme disent les guides « pour répondre à la demande touristique ». Elle est belle l'idée que les promoteurs se font de la demande touristique.
Laissons donc Mazagon, Matalascanas et consorts pour nous diriger vers El Rocio, en remontant vers l'intérieur des terres.
Voilà l'endroit le plus kitch qu'on puisse imaginer. Un village « mexicain » aux rues et à l'immense place ensablées et défoncées, autour d'une chapelle archibaroque qui contient elle même une vierge déguisée par la ferveur des pèlerins et croulant sous les ors, la « Blanca Paloma » ou Nuestra Senora del Rocio. En fait ce village est le centre et l'aboutissement d'un pèlerinage annuel, la romeria del Rocio qui chaque année à pentecôte attire un million de personnes venues de toute l'Espagne. Vous trouverez de plus amples détails dans les guides parce que je n'ai jamais assisté à l'évènement qui commence par des défilés de charrettes fleuries à travers bois et finit par des bagarres autour de la vierge. Il vaut mieux se pousser !
Moi j'en reste à la grand place presque déserte, un jour quelconque, tellement western qu'on s'attend à voir surgir les cowboys des rues avoisinantes.
Et là, commence le parc national de Donana que je n'ai pas visité non plus (pas encore j'espère). Le parc est un endroit paraît il fabuleux de marécages, de dunes, de forêts tout cela peuplé d'un nombre incalculable d'oiseaux et de 33 espèces de mammifères, dont les quelques exemplaires restants du lynx . La route qui remonte vers Séville suit la clôture du parc et traverse des marismas (zones de marais).
Mais voilà, le parc a aussi ses prédateurs, les urbanistes, promoteurs immobiliers, touristes, chasseurs (braconniers) et agriculteurs qui ont introduit dans la région cette aberration : la culture intensive de la fraise sur des plastiques noirs. Une vraie saloperie. Un épandage de produits toxiques à dégommer tout être vivant à 20 km à la ronde (y compris et surtout les derniers lynx, les épandeurs des produit et les récolteurs temporaires, importés du Maroc proche ou sans papiers, payés au lance-pierres). Tout ça pour nous envoyer à grands frais de camions des fruits inodores et insipides. Bon appétit.
Bon je vois que vous vous retournez pour contempler les débris de plastique noir emportés par le vent et qui s'accrochent gaiement aux buissons. Et vous croyez que nos sympathiques garriguettes et nos épatantes maras des bois poussent sur du velours vieil or et échappent aux pesticides tueurs ?
Allez laissons tomber les fraises...
D'ailleurs nous sommes déjà sur les périphériques de Séville, dont nous ne verrons pas autre chose cette fois ci – il faut faire des choix ! - et nous allons sur l'autre rive du Rio, tourner vers la seconde partie du triangle.
En fait en suivant le Rio – ici on ne l'appelle que comme cela, - le fleuve mythique, le Guadalquivir, c'est vers un autre triangle à l'intérieur du grand que nous nous dirigeons : le triangle du Jerez, du Xérès ou du Sherry, appelez le comme vous voudrez ! Et pas de plaisanterie oiseuse telle que : « Qu'est ce que tu Brandy-Sherry? » Le Brandy est un alcool obtenu apres distillation du vin, les Sherries sont des vins d'apéritif ou de dessert, secs ou liquoreux.
Le triangle s'inscrit entre trois villes, Jerez de la Frontera, Sanlucar de Barrameda et El Puerto de Santa Maria. Villes en apparence sans beaucoup de charme, rues bordées par les longs murs des chais. Mais il ne s'agit que d'apparence. Il y a mille choses à y découvrir.
Sanlucar s'étend juste à l'embouchure du Rio dont l'autre rive est occupée par le parc de Donana. Immenses plages de sable où on organise des courses de chevaux. A Sanlucar , le Jerez s'appelle Manzanilla, mais au delà de Sanlucar le breuvage clair, fruité et sec comme un coup de trique, perd ses propriétés, au moins était ce ce que l'on prétendait autrefois. Les marques aujourd'hui ne communiquent plus sur ce sujet. Ca vous étonne ?
La grande ville avec ses 200 000 habitants, ses grandes marques de Jerez, son atmosphère particulière, ses rues parfois lépreuses, les grilles et les ornements de ses façades qui renvoient à des temps anciens où s'étalait la richesse architecturale, ses portes entrebaillées laissant entrevoir les patios fleuris, ses vieilles demeures aristocratiques, c'est bien sur Jerez de la Frontera, ainsi nommée parce qu'ici a longtemps été la frontière entre le monde musulman et le monde chrétien. Patrie du Jerez , mais aussi du cheval, du flamenco, des traditions andalouses, peuplée d'une importante communauté gitane, on découvre peu à peu une ville très attachante. Le flamenco , on a parfois la chance de le découvrir, spontané et naturel au fond de quelque bar où tout à coup une voix éraillée s'élève et où les buveurs ne tardent pas à rythmer le chant en frappant dans leurs mains et en claquant leurs talons sur le sol. Mais bien entendu il existe plein de spectacles de flamenco plus ou moins frelatés.
Le cheval, lui possède son temple l'école royale andalouse d'art équestre.. A voir !
Quant au Jerez... La visite des chais (en tous cas ceux que j'ai visités) m'ont apporté quelques renseignements sur les principes d'élaboration de ce « sang des rois » (Cocteau). On vous ballade dans la partie historique des bodegas, on vous montre les fûts, les instruments anciens, le musée... On vous parle de l'histoire de la famille, de l'oncle...Cela se termine par une dégustation un peu pingre. Vous en savez un peu plus sur les soleras ce principe des trois tonneaux superposés dont on prélève un tiers chaque année pour le transvaser dans le tonneau inférieur, le produit du tonneau du bas étant commercialisé et celui du tonneau supérieur remplacé par le vin de l'année... Vous saurez tout des finos, olorosos, amontillados, creams, Pedro Ximenez. Mais jamais on ne vous aura montré la fabrication actuelle. Un peu frustrant.
C'est comme si visitant les usines Mamie Nova on se contentait de vous faire voir la cuisine où la brave grand'mère faisait bouillir son lait.
La prochaine fois je vous emmènerai vers l'est, dans la dernière partie de la région, parce qu'il n'y a pas que le Jerez, le flamenco, les chevaux andalous... il y a aussi les taureaux... Ollé!
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire