En ce Samedi 2 Juin la chaleur s'était abattue sur Paris, et une foule aux couleurs d'été avait envahi les pelouses. Je n'étais pas « monté » à la capitale depuis l'élection présidentielle, et il me semblait qu'une atmosphère plus légère, plus sereine, planait sur la ville. Bien entendu mon ressenti était subjectif, le ciel à l'horizon n'est pas sans menaces, mais pour le moment j'éprouve cette impression comme d'une liberté retrouvée.
Lors de ce week-end étaient au programme deux pièces de théâtre, toutes les deux données par le Comédie-Française, l'une au merveilleux Théâtre Ephémère, construit en bois dans les jardins du Palais Royal pour la durée des travaux de rénovation de l'historique salle Richelieu, et l'autre dans le salon d'honneur du Grand Palais. Etait aussi prévue la visite d'une exposition de photographies au musée Carnavalet, et la découverte d'un nouveau restaurant.
C'est de tout cela que je veux parler dans ce message. Il y eut aussi les promenades habituelles dans Paris, d'où les photos qui accompagnent le texte.
« UNE HISTOIRE DE LA COMEDIE FRANCAISE » Texte de Christophe Barbier, mise en scène de Muriel Mayette.
Au vu du titre et connaissant la compagnie, on pouvait s'attendre à une sorte de spectacle démesuré,du style « Si Versailles m'était conté » de Guitry. Non. S'il y a un mot qui me vient à l'esprit, pour la première fois sans doute depuis que je fréquente la CF, c'est celui d'insignifiance. D'ailleurs, au lever du rideau , la salle était à moitié vide ce qui ne trompe pas en ces lieux.
Cinq acteurs venaient tour à tour exposer les événements qui ont marqué, au long de cinq Siècles l'illustre maison. Je dois dire que les acteurs ne sont nullement en cause. Quoi que l'on donne à interpréter aux sociétaires et aux pensionnaires du Français, c'est dans la grande majorité des cas fait à la perfection. Et ici plus qu'ailleurs, il fallait bien du talent à Bruno Raffaeli, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Pierre Niney, et Elliot Janicot, pour intéresser un peu les spectateurs à un texte qui ne m'a pas semblé à la hauteur. On se serait cru à une fête de fin d'année sous les tilleuls de la cour de mon collège acteurs mis à part, je l'ai dit.)
Texte des plus mineurs, personnages parfois difficiles à identifier, je ne vais pas m'étendre sur le sujet. Une chose amusante quand même. Il est dit quelque part qu'au Français, surtout au XXe siècle « on confirme, plus qu'on ne découvre ». On a laissé passer des auteurs et des formes théâtrales... mais au moins là, on n'a pas laissé passer Christophe Barbier.. Bof...
« PEER GYNT» d'Ibsen mise en scène de Eric Ruff.
Voici exactement le contraire de ce dont je viens de parler.
Ibsen lui-même a dit de cette pièce : « c'était bien ce que j'ai écrit de plus fou ! »
Spectacle extraordinaire, démentiel, une mise en scène quasiment impossible, la richesse théâtrale absolue d'une histoire qui passe de la légende au terre à terre, du farfelu au grotesque, de la farce à la tragédie, du rire à l'émotion à l'état pur. Une oeuvre qui ne respecte aucune règle théâtrale, où l'on voyage, accompagnant soixante ans de la vie d'un homme à travers le monde, de la Norvège à l'Afrique, par delà montagnes et océans. L y a des trolls, des animaux féroces, un passager mystérieux et glaçant, un fondeur de boutons, des fous et des marins..
Il y a surtout un héros, Peer Gynt, menteur, hâbleur, cynique, lâche, fragile, ambitieux mais velléitaire et paresseux. Un héros des moins héroïques qui soient, et que le public suit pendant quasiment cinq heures sur la route qui traverse la salle, Une route défoncée que longent de vieux rails où circule un chariot sur lequel s'avancont la vie, l'aventure, la mort, la tempête !
Nous sommes spectateurs, sur les gradins qui longent la route des deux côtés , tant et si bien que l'action se déroule comme l'a voulu Eric Ruff « au creux du public ». Et c'est ici que pendant près de cinq heures nous assistons au déroulement de cette fable métaphysuique qui questionne sur l'identité. Etre soi-même et peut-on se départir de l'être ? La fin , très émouvante où le vieux Peer retrouve la femme qu'il a délaissée donne peut être un semblant de réponse.
A oeuvre magistrale, à mise en scène et scénographie aussi géniales et inventives, il fallait associer des acteurs à la hauteur, c'est à dire au sommet. Là encore la réussite est totale. Hervé Pierre est fabuleux tout au long de cette prouesse que constitue quatre heures trois quarts de présence en scène. Il est Peer Gynt dans toutes ses nuances, dans tous ses débordements , il est adolescent, mûr et puis vieux, sans quasiment rien changer à lui-même. Mais il ne faudrait oublier aucun des autres. C'est un plaisir de revoir l'immense Catherine Samie, dans le rôle de la mère du héros.
Je citerai aussi Bagdassarian, aussi imposant que léger. La distribution est hors pair, c'est évidemment ce que permet l'illustre compagnie. Et qui plus est chacun des interprètes (sauf Peer et sa mère) tient plusieurs rôles. Mais comme le souligne Eric Ruff, il n'y a qu'ici qu'on peut voir les plus grands comédiens dans les plus petits rôles ;
Il ne faut pas oublier enfin les extraordinaires costumes conçus par Christian Lacroix, ni la musique originale de Vincent Leterme.
Tout cela constitue une très grande réussite, et certainement l'évènement majeur de l'année théâtrale. Alors si vous passez près du Grand Palais un jour de spectacle...
UNE EXPO PHOTO : EUGENE ATGET AU MUSEE CARNAVALET.
Ah que j'aime tous ces arpenteurs des rues, qui aux débuts de la photo, et même plus tard, je pense à Ronis, ont déambulé sans trêve au hasard des rues pour nous laisser leur précieux témoignage sur une vie que nous aurions oubliée sans eux.
Ainsi en est il d'Eugène Atget ( 1857-1926) qui à partir de 1888 s'est orienté vers la photographie et a parcouru dans les rues de paris pour en saisir le spectacle quotidien.
Atget a conçu son oeuvre comme un inventaire, un répertoire des sujets qu'il immortalisait sur plaque de verre puis sur papier albuminé. Ainsi a-t-il photographié des séries, comme des heurtoirs de portes, des portails, des façades, des cours d'hôtels particuliers, des édifices condamnés à la démolition. Il s'intéressa aussi aux vieux métiers, puis au Paris d'avant Haussman. Atget a aussi photographié la proche banlieue, les fortifications, les masures et la vie misérable des pauvres gens , donnant ainsi un versant social à son oeuvre. Reconnu et adopté par les surréalistes comme moderne et vierge de toute sophistication pictorialiste, Atget , déjà reconnu de son vivant par Bérénice Abbott, figure après sa mort à l'inventaire des plus grands musées du monde. Il est considéré comme un des photographes les plus importants de l'histoire.
Mais personnellement, ce qui me touche le plus dans son oeuvre, c'est ce témoignage qu'il nous apporte sur une vie passée.
C'est vraiment une expo à voir jusqu'au 29 Juillet.
UN RESTAURANT : LE TERROIR PARISIEN.
Il est rare que je cite des restaurants dans mes propos. S'ils sont mauvais, comme c'est souvent le cas à Paris, au moins pour le budget que je veux y mettre, je préfère ne pas en parler.
Mais voila une exception, et une découverte. C'est au rez de chaussée de la Mutualité, 20 rue Saint Victor, dans le 5e, que se trouve ce « Terroir parisien », imaginé par le chef Yannick Alléno , triplement étoilé au Meurice.
L'idée est séduisante, le chef Alléno n'a pas oublié qu'il est originaire de banlieue, plus exactement de Puteaux et il a eu l'idée de faire revivre ces produits d'Ile de France, aujourd'hui presque disparus : asperges d'Argenteuil, pêches de Montreuil, chou de Pontoise, champignons et artichauts de Paris, épinards de Montfermeil etc. S 'y ajoutent des recettes très parisiennes, parfois revisitées, boeuf miroton, pièce de boeuf à la sauce Bercy, potage Saint Germain... Je n'ai pas dit que la raie provenait du bassin des Tuileries, ni le boeuf du zoo de Thoiry, hein
Le cadre est agréable, très moderne, et l'addition ne dépasse pas certaines limites. On s'en sort tres bien pour 35 ou 40€ sans les vins (dont les prix au moins pour les premiers n'ont rien d'excessif non plus). Je n'ai pas encore vu à la carte, de vins de Montmartre ou de Suresnes.
En somme une adresse à retenir.
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