Pendant longtemps l'homme n'a survécu qu'en s'adaptant tant bien que mal à la nature. Désarmé, démuni de toute possibilité de résistance aux forces extérieures, toutes ses préoccupations étaient dirigées vers sa survie. Manger, fuir, se battre occupaient ses journées. Manger des racines, des baies, chasser dans les premiers temps à mains nues puis armé d'objets primitifs, se battre contre des animaux agressifs plus forts ,plus rapides, ou contre d'autres hommes, fuir l'ennemi, le prédateur plus puissant... Fuir les conditions d'existence insoutenables. Les changements climatiques brutaux, la diminution des ressources vivrières, les catastrophes naturelles obligeaient les tribus à se déplacer vers des contrées plus avenantes.
Cela c'était le début. L'écologie à l'état brut. L'interaction des êtres vivants et de leur milieu physique, à l'époque où rien ne venait tempérer les rapports de forces entre l'un et les autres.
Puis vinrent les techniques, le développement de la chasse, de la pêche, les cultures. Peu à peu, l'homme, prédateur né sans forces et sans moyens naturels, commença à penser qu'il pouvait maitriser le milieu naturel, dominer les autres êtres vivants, aménager son espace pour en tirer subsistance , voire tirer du plaisir de ses actes dominateurs.
Alors commença l'exploitation sans retenue des ressources qui étaient à sa portée, alors commença le pillage. Long processus qui n'a pas cessé jusqu'à nos jours et qui risque d'ici peu d'atteindre son terminus.
On ne peut mieux illustrer ce processus qu'avec l'histoire des bisons d'Amérique.
Des bisons, il y en avait. Jusqu'à soixante dix millions entre le Mexique et les terres glacées du Canada. Des troupeaux innombrables qui couraient à travers les vastes plaines, soulevant la poussière et dont on entendait de très loin le grondement dû au martèlement des milliers de sabots sur le sol .
Le bison était présent à chaque instant de la vie de l'Amerindien. Il était nourriture par sa viande, protection par sa peau , outils par ses os. Encore fallait il s'en approcher pour le tuer. Les Indiens des plaines avaient mis au point des pièges à bisons, en général de hautes falaises en bordure d'une fracture où , à force de cris et de gestes on dirigeait les groupes d'animaux écartés du troupeau pour les faire ensuite plonger dans le vide. Bien entendu quand les prises étaient bonnes il y avait du gaspillage. On ne s'occupait que de ce qui était nécessaire à la tribu, le reste était laissé aux vautours et aux animaux sauvages.
Ainsi en fut il jusqu'à l'introduction du cheval.. Le cheval qui apporte vitesse et mobilité à l'homme va changer le rapport au bison. Désormais on ne chasse plus seulement pour survivre, mais aussi pour prouver sa force son habileté. La chasse devint plaisir et jeu.
Mais les choses prirent une autre tournure lorsque l'homme blanc, muni d'armes à feu se lança à la conquête de l'Ouest, et surtout lorsque se construisirent les lignes de chemin de fer.
La destruction des bisons devint alors systématique, et on passa d'une chasse artisanale à une extermination.
A cela quatre raisons , les unes avouables les autres moins. 1- il était nécessaire de protéger les voies ferrées contre le danger représenté par les bisons. 2- les bisons furent l'objet d'un commerce florissant qui concernait les peaux, très à la mode, et les squelettes qui broyés donnaient un engrais calcique intéressant une agriculture en plein développement ( la viande le plus souvent dédaignée était abandonnée sur place et pourrissait), 3- les tueurs veillaient à leur tableau de chasse, comme le fameux Buffalo Bill. Les chasseurs étaient plusieurs centaines voire un millier, et l'un d'eux se vantait d'avoir tué vingt mille bêtes. 4- la raison la moins avouable sans doute était qu'on avait décidé d'affamer les Indiens et à tout le moins de leur faire quitter leurs terrains de chasse habituels que les blancs convoitaient.
L'histoire fut vite réglée, puisqu'à la fin du XIXe Siècle ne restaient que quelques centaines d'exemplaires de l'espèce.
A noter au passage l'attitude des politiques. Le général Sheridan au Texas, et le président Grant à Washington s'opposèrent à toute interdiction et même réglementation de la chasse commerciale au bison.
Voilà donc un exemple de l'attitude de l'homme, prédateur sans scrupules et inconséquent, face aux ressources d'un milieu naturel. Sans intervention d'une autorité supérieure, c'est à dire de l'état, quand celui ci pour diverses raisons politiques, économiques, financières, ne joue pas son rôle de contrôle et de protection, l'homme poussé par son désir ou son intérêt immédiat s'avère incapable de se projeter dans un avenir et d'estimer les conséquences de ses actes.
Il en a toujours été ainsi, et on voit, ô combien tout ceci est d'actualité...
(A suivre...)
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