Les bonnes fontaines de Cussac

Il m'est déjà arrivé à plusieurs reprises sur ce blog de vous entretenir des bonnes fontaines de la région, ces endroits de croyance et de thérapie dont l'origine se perd dans la nuit des temps.

On a toujours attribué à l'eau, dès qu'elle sourd du sol, des vertus curatives et miraculeuses.

Bien avant le christianisme elle suscitait déjà des cultes, des cérémonies et des dévotions .

La moindre rigole, le plus insignifiant gouillassou où l'on boule en s'emplissant les sabots, le plus discret écrupi, portent en eux le miracle de la terre qui abreuve plantes, hommes et animaux...

C'est donc ancien. Sans doute depuis le temps où les seuls remèdes connus consistaient à se gratter, à se frotter et à s'asperger ou à se tamponner d'eau fraiche pour atténuer les douleurs.

A partir de là ont pullulé les bonnes fontaines, chacune avec sa spécificité et ses vertus thérapeutiques.

Plus tard quand les curés ont pris possession de la région, ils ont bien sur essayé d'amadouer les divinités païennes qui régnaient sur les sources en les affublant de noms de saints.

Peu contrariants, les indigènes se sont mis aux nouvelles appellations et se sont alignés derrière la croix sans rien changer ni à leurs croyances ni au fond de leurs pratiques.

Le Limousin est dur au changement.

J'avais déjà posté ici une photo de la bonne fontaine Saint George, à Tarnac, charmant village de Corrèze qui vient de s'illustrer dans l'actualité.

Ce qui prouve que Saint Georges est insensible aux maux de caténaires.

Mais aujourd'hui les fontaines qui nous intéressent sont celles de Cussac à une quarantaine de kilomètres au sud de Limoges.

Déjà la région est superbe avec ses prairies et ses forêts de feuillus, et en particulier de châtaigniers, région qui se situe en plein parc régional Limousin Périgord, à l'écart des grandes routes.

Pays de l'arbre et de l'eau, pays des feuillardiers qui jusqu'à une date récente établissaient dans les clairières leur villages de huttes en copeaux de châtaigniers, matériau dont ils se servaient pour la confection d'objets de vannerie et de meubles rustiques, la région a vu au début du XIXe siècle les exploitsdu brigand Burgou, figure emblématique du Limousin.

Près du village de Cussac, perdues au milieu des châtaigneraies, existent donc trois de ces fontaines, toujours en activité comme en témoignent les peillous de toute nature accrochés aux arbres proches.

 

 

 

 

 

 

 

(on accroche ainsi près de la fontaine un linge qui a touché le corps du malade).

 

 

Le site a été aménagé et ce n'est certes pas ce qui a été fait de mieux.

Au moins des panonceaux explicatifs nous expliquent ils que le premier miracle du lieu, c'est que les croix y récitent des prières.

Quels maux ces bonnes fontaines sont elles susceptibles de soigner? En fait le registre est étendu et les saints ne sont pas regardants: rhumatismes, maux de dents, maux de tête, mariages (sic), peurs des enfants,(je ne sais pas si c'est quand on a peur des enfants ou quand les enfants ont peur), et maladies du bétail, perte du lait, furoncles...

Il existe encore au fond des campagnes de vieilles femmes qui s'y connaissent à merveille pour vous indiquer le saint auquel il convient de faire ses dévotions et la fontaine appropriée.

Je pensais que le métier s'était perdu, concurrencé par les progrès de la médecine, mais vu le nombre de peillassous accrochés aux branches basses près des fontaines de Cussac, je me rends compte qu'il n'en est rien.

Il se peut que demain, vu ce que devient la protection sociale sous le régime actuel, les bonnes fontaines soient le seul recours des malades.

Les saints risquent d'avoir du boulot.