Pourquoi Lethbridge?
Pourquoi , au cours de ce voyage dont l'objectif était une double traversée des Rocheuses, de Vancouver à Calgary en passant par les parcs nationaux de Jasper et de Banff, et le retour plus au Sud par les vallées qui longent la frontière des USA, avoir prolongé d'une étape vers l'Est?
Une étape pour rien?
Comme si après avoir visité le Pays Basque, il prenait tout à coup envie au voyageur un peu fêlé d'aller voir Cercottes.
Pourquoi? Peut être qu'il n'y a pas de réponse. Ou qu'il y en a quand même.
Peut être le vent dans les grands espaces. La prairie qui ondule. Peut être le martèlement des sabots des immenses troupeaux de bisons faisant trembler le sol, réminiscence de « Danse avec les loups ».
Le retour aux images de l'enfance.
Peut être l'espoir de rencontrer un de ces convois de chariots regroupé autour d'un feu... Peut être la silhouette d'un cow boy solitaire trainant sa mélancolie sur fond de ciel aux reflets de couchant..
Tandis que la highway fonce en droite ligne vers le Sud Est, les montagnes bleutées s'effacent à l'horizon.
Les interminables trains du Canadian Pacifique tracent leur lourd chemin parmi les épis.
La plaine est là; immense , sans limites, un peu de prairie parfois mais surtout des étendues de céréales et de graminées. Des ranches isolés, de hauts silos à grain viennent rompre la monotonie du paysage...
Les indiens sont là, dans les réserves, les Pieds Noirs, les Blood et les Crees.
Une réserve:de pauvres maisons simples aux abords négligés entourées de carcasses de pick-up rouillées, de ferraille.s diverses, de vieux pneus.. Impression de pauvreté et de laisser-aller. Quelquefois flotte le drapeau de la communauté.
Fort Mac Leod, le bastion le plus avancé de la police montée canadienne à l'Ouest dans les années 1860-70. Du folklore certes.
Près de là le plus grand piège à bisons d'Amérique. Une roche escarpée où les natifs conduisaient les animaux pour les obliger à sauter dans le vide.
Pendant des siècles le bison fut l'animal essentiel des indiens de la plaine. Il fournissait tout ou presque, la nourriture, les tipis, les vêtements, les cordes des arcs, les cuillers en os... En 1730, l'apparition du cheval rendit la chasse beaucoup plus facile, et plus destructrice... Puis vint l'homme blanc ,le chemin de fer et le commerce. On s'en prit aux troupeaux pour de multiples raisons, le commerce, l'industrie, la traite des peaux, la sécurité du chemin de fer, la politique vis à vis des amérindiens, le désir de les affaiblir de les repousser et de les soumettre. On tua sans compter. Du troupeau estimé à 50 ou 70 millions, il ne restait que 800 individus vers 1900.. Aujourd'hui le bison est en élevage ou en zoo... Triste histoire, tout à fait représentative de la bêtise de l'homme.
"Quand le bison était abondant, nous étions libres, ce furent les bonnes années. Bien que les troupeaux de bisons ne couvrent plus les grandes plaines, nous nous en souviendrons longtemps." (Red Oak, chef Sioux)
Lethbridge. Ce fut une ville minière. Une de ces villes de l'ouest comme tant d'autres.. chemin de fer, charbon en firent une ville champignon passée de 4 à 2500 habitants en cinq ans, fondée en 1890.. Aujourd'hui c'est une ville de cent mille habitants, la quatrième d'Alberta.. Mormons, huttérites, japonais , indiens,(la plus grande réserve du Canada se trouve aux portes de la ville) font partie du paysage urbain. La vallée encaissée de l'Old Man river coupe la ville en deux traversée par un vertigineux viaduc ferroviaire sorti tout droit d'un western... Sinon, rien.
Rien que cette atmosphère de l'Ouest lointain. Ces effluves d'un monde disparu. L'idée qu'on s'en fait, même si rien du passé n'existe plus ou presque.
Demain nous regagnerons les montagnes par la route du Sud, en suivant les frontières du Montana et de l'Idaho... Plus au sud , mais si près, il y a encore le Wyoming... Le Wyoming, encore un nom à faire rêver. En d'autres temps...
Mais pour cause de Bush et d'Irak nous ne passerons pas la frontière. Par principe.. Il ne faut pas exagérer.
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