Voir... les paysages bien entendu!
A peine installé dans la voiture de location que l'on a récupérée à l'aéroport international de Palerme « Falcone e Borsellino »(du nom de deux juges anti-maffia assassinés dans les années 90) , on se trouve confronté aux aléas de la circulation sicilienne.
Un Sicilien m'a dit: « j'ai conduit en France et la circulation chez vous est bien plus dérangeante qu'ici ». Je veux bien le croire. L'adaptation pour les Siciliens aussi doit être difficile.
Dès qu'on prend la route et qu'on est confronté à la première queue de poisson, au premier franchissement de stop à toute allure, on se pose quelques questions. Mais pour prendre toute la mesure de la chose, il faut se glisser au milieu de la circulation palermitaine, comme au centre d'un manège infernal. C'est lorsqu'on est un peu perdu, qu'on cherche vainement sur d'hypothétiques plaques le nom de la rue où on se trouve, qu'on prend vraiment conscience du piège refermé.
De tous côtés cerné par l'automobile, et en ville par le vespa plus sournois et inconscient, qui surgit de partout, droite, gauche, devant derrière sans que l'on puisse vraiment prévoir sa trajectoire future, on se sent quelque peu perdu et impuissant. Chacun fait sa place, force le passage, utilise pour se glisser le peu d'espace dont il dispose, à quelques millimètres des parechocs ou des portières. Une minuscule erreur d'appréciation et c'est la balafre, le gnon ou l'enfoncement. Et pourtant ça passe, le plus souvent..(pas assez pour que l'immense majorité des véhicules roulant dans Palerme ne conserve quelque souvenir d'un frottement un peu trop appuyé).. Tout cela se déroule au milieu d'un étourdissant tintamarre de klaxons, dont le voyageur lointain doit philosophiquement s'habituer à accepter sa part.
Alors voici pour les candidats à l'épreuve quelques éléments à prendre en compte.
Surtout, en premier oublier ce que l'on sait et la façon dont on se débrouillait juste quelques heures auparavant lorsqu'on a abandonné sa propre voiture au parking de l'aéroport.
Se dire que l'essentiel est de ne pas se trouver sur la trajectoire des autres et qu'il convient de débarrasser au plus vite l' endroit où l'on se trouve. Et pour ce faire, ne tenir aucun compte de toute la signalisation qui ne peut inciter qu'à ralentir ou s'arrêter, comme les stops ou les feux rouges. Ce sont exactement les endroits où il convient de foncer sous peine de déclencher un concert symphonique..
Sur route, ignorer superbement la signalisation horizontale et en particulier les double lignes blanches ... Il est vrai que le Sicilien en promenade peut aussi prendre tout son temps pour contempler le paysage à vingt à l'heure, sans aucun souci pour les hurlements de freins et les crissements de pneus de ceux qui sont surpris de le découvrir au détour d'un virage.
Stationner est aussi un problème. Il n'y a pas suffisamment de place pour toutes ces voitures. Paradoxalement par rapport à ce que je viens d'énoncer, on peut stationner n'importe où sur la chaussée. Il suffit de descendre de voiture et de fermer sa portière. Chacun s'arrangera sans réelle protestation avec cet obstacle nouveau.
On peut voir des choses étranges, comme des véhicules traversant d'un trait la file d'en face pour se garer à contre sens le long du trottoir. Ou une voiture doublant à gauche de le ligne blanche, se trouvant face à une autre et croisant celle ci sur sa gauche, sans aucun problème, juste avec un petit nuage de poussière s'élevant du bas-côté.
Inutile de préciser que le pauvre conducteur venu du Nord, soumis aux douze points de son permis de conduire, attentif à ne pas forcer les priorités passe de sales moments, la tête rentrée dans les épaules, attendant l'inéluctable choc, assourdi par la polyphonie des avertisseurs déchainés.
Heureusement le Sicilien est d'une gentillesse à toute épreuve. Losqu'il parvient à vous doubler et qu'il se trouve à votre hauteur, jamais un geste obscène ou méprisant, jamais un regard meurtrier comme c'est le cas sous nos latitudes (et comme il arrive à votre serviteur... bon je n'ai pas dit que je me confessais, hein!) Le Sicilien lui,ne vous en veut pas...
En fait n'allez pas déduire de cet exposé que l'Italien du sud en général et le Sicilien en particulier, conduit mal... Ce serait totalement faux. Il maitrise pleinement son véhicule, et il manifeste une grande assurance au volant. Simplement sa philosophie de la conduite est différente de la notre.
Mais direz vous, et la police? Elle n'existe pas? Mais si mais si... Nous avons vu les carabinieri regarder passer le flot de la circulation, impassibles, patients, indifférents... Pourvu que le fleuve continue de s'écouler tout baigne. Peut être que ce qui les énerve eux aussi ce sont les imbéciles qui s'arrêtent au feu rouge et leur mettent la chienlit.
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