Comme dirait monsieur de la Palice, un itinéraire part toujours d'un point. Le point, je l'ai là sous les yeux au moment où j'écris ces lignes : c'est l'énorme marronnier qui se dresse face à mon balcon, m'obstruant un peu surtout en été, la vue sur le monde extérieur,mais m'offrant à chaque saison, chaque jour, et même à chaque instant, un spectacle toujours changeant.
Je le regarde.
En ce moment il est calme, pas un souffle ne remue les quelques feuilles qui lui restent et que le soleil mordore.A travers ses branches je vois l'autre côté de l'avenue, et au delà le coteau qui borde la Vienne sur la rive opposée.
C'est là le premier arbre de mon entourage, et donc celui qui me sert de point de départ. A li tout seul, il pourrait justifier de ma part la possession d'un appareil photographique, quoique, à vrai dire, il est très rare que je le prenne en photo, sans doute parce qu'il est là, que je peux le contempler en direct, que je n'ai pas besoin de l'immortaliser sous forme d'une image plate. Il est d'ailleurs fort possible si les maladies ne s'en mêlent point, qu'il survive à tous les supports modernes qui permettraient de conserver sa représentation.
Le vent s'eveille et je vois voltiger quelques feuilles.
De ce marronnier je ne sais pas grand chose. J'ignore son histoire, je ne sais pas son âge, ni qui l'a planté, ni pourquoi. Ce que je sais, c'est qu'il est le fleuron de ce qui reste du parc, juste ce qui a justifié de la part des promoteurs l'appellation de « Parc », et qui était avant la construction de l'immeuble que j'habite, le siège d'une maison d'édition.
Il y a quelques autres arbres autour. Un autre marronnier que je ne vois pas de ma fenêtre mais qui est beaucoup moins imposant et beau que celui-ci, quelques conifères. Dans mon dos même, sous l'autre fenêtre de cette pièce, il y a un énorme vinaigrier qui a encore tout son feuillage estival. Je n'aime pas ces arbres ornementaux vite poussés autant qu'envahissants.
Voici donc mes arbres. Leur seule caractéristique commune est d'avoir à un moment attiré mon regard. Par leur envergure, par leur solitude, par leur fragilité, par la beauté de leur feuillage, par la lumière qui les traversait. Une émotion d'un instant, dont parfois, en voyant les photos, je ne retrouve pas le souvenir.
C'est un peuple d'arbres anonymes, sans nom , sans histoire, parfois sans lieu d'attache. Je suis capable pour certains de les retrouver, de me rappeler leur emplacement précis.
Pour d 'autres c'est à peu près, voire pas du tout.
Il y a des arbres de chaque saison, arbres du printemps aux feuillages naissants, encore fragiles, des arbres dans la plénitude de leur verdure estivale, des arbres d'automne évidemment reconnaissables au chatoiement de leurs couleurs, et des arbres d'hiver aux moignons noircis desespérement tendus vers le ciel bas..
Il y a des arbres du matin traversés par les premiers rayons du soleil et des arbres du soir dont les silhouettes se découpent sur fond de soleil couchant, des arbres fantomatiques surgis du brouillard, des arbres qui s'égouttent apès la pluie .
J'aime ces rameaux ourlés de gouttes resplendissantes au premier rayon du soleil de retour après l'orage.
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