Le chanoine -empereur fut, en ce temps là, pris d'une frénésie religieuse, envahi par l'Amour de Dieu, et soudain saisi à l'envie de redonner à la foi et à Dieu leur véritable place dans le monde.
Certains pensèrent que cette révélation lui avait été faite par Dieu lui même, au travers de son téléphone portable, alors qu'il était en entretien à Rome avec le Pape.
Dieu lui aurait dit ce jour là : « N'écoute pas cette vieille baderne, c'est toi que je charge désormais de me représenter sur terre, comme le nouveau messie. Je ne sais pourquoi mais depuis des lustres je me suis trompé dans la désignation de mes représentants sur terre, ils ont torpillé mon église officielle, et vidé les lieux de culte. Ce ne sont que des erreurs de casting. Désormais c'est à toi que je ferai confiance. Je te vois jeune, vigoureux, amoureux en plus, et pour moi tout est Amour. J'aime ta précision, ta montre brille comme les ors de mes temples. Je te rappelle dans cinq minutes pour avoir ta réponse. »
L'empereur se demanda s'il n'avait pas entendu des voix, mais cinq minutes plus tard, le téléphone sonna à nouveau au beau milieu d'une phrase du vieux pape, un peu surpris par ce malotru qui , à la première sonnerie, ne prêtait plus aucune attention à ses propos.
- « Alors? Demanda la profonde vois du Père tout puissant, as tu réfléchi à ma proposition?
- Oui dit l'Empereur, accepter me tente beaucoup, mais je ne suis pas certain de pouvoir, malgré mes compétences, mon énergie;, mon savoir et ma volonté, remonter une entreprise qui vraiment est au fond du gouffre.
- Ah , dit la voix, c'est donc si grave que cela. ? Bon je vais réfléchir, je te rappelle dans cinq minutes, je consulte mes conseillers.
Cinq minutes plus tard, l'appareil fit à nouveau entendre sa petite musique, au grand désarroi du Souverain Pontife qui n'avait , tout au long de sa longue existence, jamais vu chose pareille.
- « voilà dit la voix, ce que je veux ce sont des églises, leur nom, je m'en fiche. Ne suis-je pas Dieu? Toutes les Eglises m'appartiennent qu'on les appelle comme on voudra! Et puisque tu es le souverain d'un Etat laïque, tu n'auras qu'à appeler cela Laïcité positive. Ton rôle consistera donc à me remettre au premier plan.
- Et vous, en échange que me donnez vous? demanda l'Empereur.
- Ah dit la voix divine, on m'avait bien dit que tu étais gonflé mais je ne pensais pas à ce point là. Bon je te rappelle .
Cinq nouvelles minutes passèrent et la sonnerie interrompit derechef la conversation avec le vieux Pape.
Dieu semblait un peu irrité: « Ecoute dit il à l'Empereur, il ne faut quand même pas trop m'en demander, vue la ribambelle de péchés qui te traînent au cul. Tu as trahi je ne sais combien de fois, tu as divorcé à deux reprises, tu as sauté toutes les femmes que tu pouvais, tu as vidé les caisses, tu te désinteresses complètement des pauvres au profit des riches, je veux bien te pardonner tout cela mais je ne peux rien faire de plus. Mes caisses sont vides à moi aussi! Tout ce que je peux te promettre, c'est une place au Paradis. Pour le reste tu as des amis qui te prêteront des avions et des yachts, tu n'es pas à plaindre. »
L'empereur accepta donc, malgré le salaire trop faible à son goût, une tâche qu'il jugea malgré tout à sa hauteur, et, sans doute inspiré par le Divin imagina sur l'heure le discours de Latran qui ne fut que le début d'une série, précédant celui d'Arabie où il prononça trente fois le nom de Dieu, et bien d'autres, tant devant des Musulmans, que des Catholiques, des Juifs ou des Protestants. L'essentiel lui semblait de regrouper toutes ces églises séparées dans l'orbite du Seigneur.
Le seul ennui était que la Constitution de l'Etat laïque ne permettait pas de mettre en avant les croyants par rapport aux athées, et que les discours impériaux qui privilégiaient les croyances et désignaient comme sans valeur ceux qui ne croyaient pas ou pas comme il faut, passaient mal auprès du peuple.
Dans son grand projet le nouveau Messie-Chanoine-Empereur commença à rencontrer des difficultés.
Et les choses empirèrent lorsque la conseillère Mignon crut bien faire, sans doute sans avoir auparavant consulté le Souverain, car les conseillers en ce temps là parlaient à tort et à travers sans jamais en référer à leur maître, d'inclure les Sectes dans le nombre des religions estimables qui donnaient accès aux bontés divines.
En un moment la société s'embrasa: opposition, opinion publique, croyants et mécréants confondus, et même certains courtisans ou membres de la majorité.
L'affaire prit vilaine tournure au point que le souverain se trouva dans l'obligation d'intervenir pour démentir sa conseillère, et protester de son intransigeance vis a vis des sectes et de tout ce qu'il avait fait auparavant pour contrer ces néfastes organismes.
Mais aussitôt sortirent de partout des images où on le voyait quelque temps auparavant accueillir avec de grands gestes fraternels l'un des représentants éminents de la secte scientologue..
Il y en eut même pour prétendre que toute cette grande agitation politico religieuse, n'avait été déployée que dans le but d'autoriser dans l'empire les pratiques de cette secte, et si nous-mêmes nous n'avions pas tenu de source sûre, les preuves de l'intervention divine le jour de la réception au Vatican nous aurions pu prêter attention à ces propos impies et malséants.
A vrai dire notre Empereur est tellement malhabile que ses plus grands desseins prennent vite l'allure de médiocres aventures mal menées et qui tournent en eau de boudin.
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